mardi 23 juillet 2013

Bellefontaine, le mardi 23 juillet 2013

Quelques notes suite à la visite du 23 juillet 2013 à la Fermette de Bellefontaine
Le chemin d’accès est au contact de deux mondes : celui de la « forêt », ici un bois de pente qui marque un espace probablement jamais cultivé vu le relief, et celui de l’espace agricole.
La bruyère cendrée de la lisière forestière
La lisière du bois est marquée par la présence de quelques plantes caractéristiques : la callune, la bruyère cendrée, la myrtille, l’épervière piloselle... Le hêtre constitue l’essentiel des arbres (6 sur 7 en lisière par exemple). Cette essence est bien adaptée au climat humide du Mortainais. La Fermette est à 275 m d’altitude ; au sud, la colline culmine à 280 m ; « en bas », la Sée coule à 75 m à Chérencé-le-Roussel.
Côté bocage, la parcelle en culture de céréale rappelle que jusqu’au milieu du 19e siècle, 80% des terres agricoles normandes étaient labourées ! Ce n’est qu’ensuite que le lait et la prairie ont imposé leur image verte de la Normandie... De même, deux des haies actuelles sont récentes : elles n’existent pas sur le cadastre napoléonien au début du 19e siècle. Sur la lisière du chemin, quelques plantes sauvages
Les parcelles cultivées du bocage ancien
marquent l’espace de la prairie naturelle : la centaurée (proche du coquelicot), le lotier ; elles ont en commun d’être attractives pour les bourdons, les abeilles, les papillons...
À cette heure de la journée, les insectes butineurs sont dans les « sapins » : pas de fleurs, mais probablement déjà beaucoup de miellat : des pucerons excrètent un liquide sucré qui est léché par les insectes, dont les abeilles qui vont en faire une sorte de miel très parfumé. Quelques cris discrets de roitelet huppé rappellent que cette espèce est fortement liée aux résineux. Ailleurs dans le bois, une famille de grimpereau des jardins vient de sortir du nid. Le pinson des arbres, la fauvette à tête noire, le pouillot véloce, le pigeon ramier et les hirondelles rustiques (et la buse en vol) sont les seuls oiseaux à se manifester vu la date avancée en saison.
L'étui du cigarier du bouleau
Un vulcain se pose sur le chemin. Ce sont peut-être des chenilles de cette espèce de papillon qui se développent sur un petit massif d’orties bien éclairées ; ou de petite tortue, ou de paon du jour : tous ces papillons pondent sur les orties... ce qui est mieux admis que les piérides qui cherchent les choux locaux (cultivés...) Un autre insecte, minuscule, marque la visite : 3 mm pour le « cigarier du bouleau », du groupe des charançons. La femelle découpe et plie la feuille du bouleau (ou du noisetier) pour en faire un étui en cône où elle pond. Encore faut-il mordre juste ce qu’il faut la nervure centrale pour que l’étui pende et fane sans se détacher trop vite de l’arbre... Rapporté à la taille de l’insecte, c’est comme si un homme roulait un tapis de 45 m de large !
Une pensée émue pour le travail que représente l’entretien des bandes de légumes à « défendre » contre la concurrence des plantes adventices, les « mauvaises herbes » (renouées, chénopode, spergulaire...) ; mais aussi le souvenir de la richesse potentielle de ces mauvaises herbes porteuses de graines dès la fin d’été. Ces graines étaient la source de survie des oiseaux granivores au cours de l’hiver à l’époque où les chaumes existaient encore. Linottes, verdiers, bruants, pinsons, alouettes étaient tributaires de ces pratiques culturales. Actuellement, plusieurs de ces espèces sont inscrites sur la liste rouge des espèces menacées en Europe ! Les cultures d’hiver ont anéanti les chaumes.
Entre bois et bocage
Un sorbier des oiseleurs, une aubépine poussent au pied du piquet de clôture ; pas par hasard, ce sont les oiseaux qui ont déposé des crottes contenant les graines de ces plantes. L’accord est répandu dans la nature : je te donne à manger (la pulpe du fruit), tu sèmes mes graines. Le lierre est un exemple connu : il suffit d’observer les piquets de clôture porteurs de lierre après quelques années. Il y a aussi les transporteurs « petite tête » : le geai perd assez souvent des glands quand il est posé sur la clôture : un futur chêne !
Elément traditionnel du bocage du Mortainais, la barrière à écharpe est ici représentée par deux exemplaires. Le talon est typiquement découpé avec fantaisie, souvent avec art dans les cas les plus représentatifs. Ces derniers témoins mériteraient attention et protection, au moins une mise à l’abri de la destruction en attendant une mise en valeur muséographique. 

© J. COLLETTE/GONm- 23/07/2013